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Une révolte sanglante – Le tour du monde de Magellan (2/3)

Après un suspense insoutenable, voici la partie 2 de l'épopée de Magellan ! Gros drames à l'horizon. Comment mater une mutinerie quand on est perdu aux limites du monde connu ?

Reprenons ! À la fin de notre premier épisode, Magellan montrait à sa flotte qui était le patron. Alors qu’elle était censée se diriger directement vers le Brésil, Magellan, sans prévenir qui que ce soit, a pris la décision de longer la côte africaine. Le capitaine du San Antonio, Juan de Cartagena, lui demande des explications, avant de se faire envoyer bouler comme un malpropre.

Magellan 1 – 0 Capitaines espagnols

L’incompréhension de l’équipage est totale. Les voilà en train de se faire mener à la baguette par cet émigré portugais qui prend des décisions farfelues et qui refuse de s’en expliquer !

Cet épisode ravive l’orgueil de Juan de Cartagena, qui décide de défier l’autorité de Magellan. Pendant trois jours, il refuse de se présenter à celui-ci et de le saluer, comme il avait été convenu. Cela ne plaît pas DU TOUT à Magellan !

Mais voyez-vous, pour Magellan, la vengeance est un plat qui se mange froid… Il attend, il attend… Tous les jours il vaque à ses occupations d’amiral.

Suite à un accident causé par un matelot, Magellan convoque ses capitaines. Juan de Cartagena ne lâche pas le morceau et l’interroge à nouveau à propos du changement d’itinéraire. Magellan, aimable comme une porte de prison, refuse de lui répondre. Le ton monte, les esprits s’échauffent, et Cartagena commet une faute d’insubordination. Erreur ! Magellan profite du pouvoir qui lui a été confié. Il attrape Juan de Cartagena par le colback et lui hurle : « VOUS ÊTES MON PRISONNIER ! »

Pour éviter de mettre aux fers un gentilhomme espagnol, Cartagena, démis de ses fonctions de capitaine, est placé sous la surveillance de Luis de Mendoza, le capitaine du Victoria.

Le voyage commence bien !

À l’approche de l’équateur, la flotte change de cap. Direction le Brésil !

Satanée carte !

13 décembre. Après environ trois mois de voyage, la flotte atteint la baie de Rio de Janeiro. Nos marins feront une escale de quelques semaines sur la côte brésilienne, où ils feront mumuse avec des indigènes, en échangeant notamment des babioles contre des fruits exotiques… et des femmes ! Puis ils se mettront à la recherche du Graal, ce fameux passage censé mener aux Indes.

C’est donc en toute sérénité que Magellan suit sa carte. Selon celle-ci, le passage se présente sous la forme d’un grand golfe qui s’étend sans fin vers l’ouest. Sans surprise, un tel golfe se présente à eux. Magellan, tout fier de lui, se voit déjà en train de se la couler douce sur les plages des Moluques.

Léger problème : le golfe est fermé. Coup de tonnerre pour Magellan, la carte est fausse !

Imaginez : vous plongez dans l’inconnu, à l’autre bout du monde. Vous n’avez pas de téléphone portable, pas de GPS. Personne ne peut vous aider, puisqu’à l’époque l’endroit était toujours vierge. Et au moment où vous pensez trouver votre chemin, il s’avère que c’est un cul-de-sac ! Vous vous rendez compte, à ce moment-là, que vous avez fait une grave erreur…

La flotte se trouve en fait à l’embouchure du Rio de la Plata.

Pendant deux longs mois, la flotte va fouiller la côte. On explore la moindre baie, le moindre golfe. Mais à chaque fois Magellan verra ses espoirs se briser contre les récifs.

Pour arranger les choses, la météo décide d’en rajouter une couche : « […] de violentes tempêtes secouent les voiles, la neige et la grêle s’abattent sur eux avec fracas […]. Le vent les frappe brutalement au visage et s’infiltre à travers leurs vêtements qui commencent à se déchirer. Déjà les mains gèlent au contact des cordages couverts de glace […].

Le 31 mars, un nouveau golfe, fermé lui aussi. C’est ici que la flotte passera l’hiver austral. Il s’agit de la baie de San Julian, en Patagonie. Une terre morne, déprimante au possible, qui sera le théâtre d’épisodes sanglants…

La mutinerie de Pâques

Dehors, la pénombre. Magellan sommeille, après un repas de Pâques… assez gênant. Et pour cause : ils ont tous refusé de dîner avec lui. L’ambiance est épouvantable. Certains hommes ont déjà été emportés par le froid, et Magellan refuse toujours de communiquer avec les capitaines.

Au beau milieu de la nuit, un canot transportant une trentaine d’hommes, dont trois des capitaines, notamment Juan de Cartagena, l’ennemi juré de Magellan, se dirige silencieusement vers le San Antonio Mais que manigancent-ils ? Ces hommes n’ont pas reçu l’ordre de quitter leur navire, alors pourquoi sont-ils dehors ?

Vous vous souvenez de la lettre que Magellan a reçue, dans la première partie, comme quoi les capitaines espagnols avaient prévu de se mutiner ? Eh bien, nous y sommes !

Une fois à bord du San Antonio, ils s’en vont chercher le capitaine remplaçant et l’enchaînent lui ainsi que tous les Portugais présents sur le navire. Mais un des hommes du San Antonio les a remarqués et s’apprête à lancer l’alerte. Celui-ci reçoit six coups de poignard dans le bide, direct, sans sommation.

En l’espace de quelques minutes, et ce dans le silence le plus absolu, le navire le plus imposant de la flotte, et donc le mieux armé, est tombé aux mains de mutins !

Le lendemain, les rebelles se révèlent au grand jour et annoncent que l’équipage du San Antonio ne répondra désormais plus aux ordres de Magellan. Pire encore : le Victoria et le Concepción font partie de la rébellion ! Catastrophe : Magellan a perdu trois navires sur cinq ! Il ne lui reste plus que le Trinidad, qu’il dirige, et le Santiago, le plus petit de la flotte.

Magellan contre-attaque

Petit problème : les mutins ne savent pas à qui ils ont affaire.

Magellan envoie cinq hommes, en apparence non armés, à bord d’un canot en direction du Victoria. Ils sont chargés de remettre une lettre au capitaine, Luis de Mendoza, l’invitant à se rendre sur le navire amiral afin d’échanger calmement avec Magellan. À peine a-t-il le temps de finir sa lecture… qu’on le poignarde à la gorge ! Stupeur parmi l’équipage, le capitaine rebelle a été assassiné de sang-froid !

Et ce n’est pas tout ! Magellan a bien préparé son coup : pendant que Mendoza lisait la lettre, un canot de 15 hommes approchait discrètement du Victoria. Ils attendaient l’assassinat du capitaine pour monter à bord, profiter de la terreur ambiante, et ainsi imposer leur commandement. Bref, la technique « choc et effroi » avant l’heure. Magellan a donc l’avantage ; les mutins n’ont plus que deux navires.


L’assassinat de Mendoza
Rapidement, Magellan ordonne de barrer la route aux rebelles en fermant la sortie du golfe. Le Concepción et le San Antonio font face au Trinidad, au Victoria et au Santiago, tous les trois menaçants et prêts à les réduire en pièces. Mais le courage manque aux mutins. Impressionnés par la témérité et la brutalité de Magellan, ils jettent leurs armes.

Magellan 2 – 0 Capitaines espagnols : fin du match

Vous vous demandez sûrement ce qui arrive aux rebelles ? Accrochez-vous.

Autres temps, autres mœurs… À cette époque, les amiraux avaient droit de vie et de mort sur leur équipage. Mais massacrer tous les rebelles aurait été terrible pour l’expédition. Dans ces régions inhospitalières, on a besoin de bras. Magellan fait donc condamner à mort, par décapitation, le capitaine du Concepción, Gaspar de Quesada, responsable du meurtre commis à bord du San Antonio. Mais il ne le fait pas n’importe comment.

Puisque personne ne souhaite couper la tête d’un des capitaines, Magellan ordonne au militaire ayant porté les coups de poignard, qui ne faisait qu’exécuter les ordres de Quesada, de choisir entre la vie de son capitaine… ou la sienne ! Le choix est vite fait.

Mais ce n’est pas fini. Les coutumes de l’époque voulaient que l’on démembre le corps du condamné et qu’on plante les morceaux sur des piques, disponibles à la vue de tous. C’est ainsi que les corps des deux capitaines tués furent démembrés et « éparpillés » sur la baie de San Julian. Chaud.

Vous croyez que c’est terminé ? Il reste deux hommes dont Magellan veut régler les comptes. Le véritable instigateur de la mutinerie, son ennemi de toujours : Juan de Cartagena, ainsi qu’un prêtre zélé qui appelait souvent à la révolte.

En bon catholique soumis à la Couronne espagnole, Magellan ne pouvait pas faire décapiter un prêtre, et il ne pouvait pas non plus condamner à mort Cartagena, car celui-ci avait été expressément nommé adjoint de Magellan par Charles Quint. Il décide donc de les abandonner à leur sort, seuls, sur une petite île à proximité, en plein hiver…

Si jamais vous devez mater une révolte en pleine mer, à l’autre bout du monde, et ce sans police ni armée, vous savez maintenant comment vous y prendre !

Le chemin introuvable

À la fin de l’hiver, la flotte reprend la quête du passage. Magellan envoie son vaisseau le plus rapide, le Santiago, en éclairage afin d’explorer les golfes qui se situent plus au sud.

Plusieurs jours passent… et toujours rien. Le Santiago ne revient pas. Magellan apprendra quelques jours plus tard qu’une tempête a projeté le navire contre la côte, le réduisant en mille morceaux ! Un canot s’en va récupérer l’équipage échoué. Après un an de voyage, Magellan a perdu un navire et trois capitaines, et il n’a toujours rien trouvé !

Dépité, notre explorateur impose à la flotte un nouveau repos de deux mois. Il admet enfin son incertitude à ses officiers quant à l’existence du passage : « Jusqu’au dernier moment l’homme qui, doué d’une volonté prométhéenne, veut arracher à la terre son secret sentira la griffe du doute lui déchirer le cœur. »

Après ce repos, la flotte reprend les recherches. On continue de fouiller chaque baie, chaque golfe. Sans relâche, on explore le moindre recoin de cette terre désolée.

Soudain, ils tombent sur un golfe étrange. Celui-ci n’est pas comme les autres. Les eaux y sont profondes et noires. Les falaises sont abruptes et présentent de profondes crevasses, et on y aperçoit au loin des cimes enneigées. Tandis que l’équipage est convaincu qu’il ne s’agit là que d’une énième baie fermée, le sixième sens de Magellan s’affole !

Il ordonne de séparer la flotte : le San Antonio et le Concepción doivent aller le plus loin possible en avant et revenir d’ici cinq jours. Le Trinidad et le Victoria, eux, s’attellent à fouiller l’extérieur de la baie.

Pour changer, une violente tempête éclate ! Le Trinidad et le Victoria s’en sortent, mais pour ce qui est des deux autres navires, Magellan craint le pire…

Un jour. Deux jours. Trois jours. Quatre jours. Les navires ne reviennent pas. Magellan est à bout ! Déjà il voit son entreprise échouer lamentablement entre ces falaises. Déjà il se voit perdre son pari, comme d’autres navigateurs avant lui.

Tout à coup, des déflagrations ! Est-ce un orage ? Magellan est-il en train de perdre la tête ? Non ! Ce sont les canons du San Antonio et du Concepción qui tonnent au loin ; les deux navires reviennent enfin ! Tous les drapeaux sont hissés, toutes les oriflammes dressées. On commence à entendre les cris de leur équipage, et les coups de canons se succèdent. Magellan connaît ce langage ; c’est celui de la victoire !

Les éclaireurs ont trouvé une voie étroite, où l’eau est profonde et reste salée. À ces mots, le sang de Magellan ne fait qu’un tour : ce doit être LE passage ! Le moral remonté à bloc, la flotte fonce toutes voiles dehors.

La délivrance

Les jours qui suivront, nos hommes affronteront mille obstacles. À plusieurs reprises, des bourrasques de vents manquent de les faire s’échouer contre des falaises menaçantes. Ce qu’on nommera plus tard le détroit de Magellan est en fait un véritable labyrinthe dans lequel il est extrêmement difficile de naviguer. Pendant de longues années, Magellan a été le seul homme capable de le traverser sans accident !


Entrée du détroit de Magellan

Après un mois de navigation ardue, la flotte arrive à une énième bifurcation. Rebelote : on se sépare. On envoie le San Antonio et le Concepción d’un côté, et un simple canot de l’autre. Le Trinidad et le Victoria attendent.

Quelques jours plus tard, le canot revient. Ça y est. Après plus d’un an de navigation, après tant de souffrances et de déceptions… ils ont ENFIN trouvé le passage ! En ce mois de novembre 1520, Magellan réalise l’exploit que tant ont cherché à accomplir. Submergé par l’émotion, il craque : Magellan pleure de joie.

Comme quoi, même les Chad peuvent pleurer !

Magellan vs le Pacifique

Mais que serait la vie de Magellan sans son compagnon le plus fidèle : la poisse ? Car si le Concepción est bien revenu, le San Antonio ne donne aucun signe de vie. Pendant des semaines, la flotte le cherche. Mais impossible de le trouver.

Ils ne le savent pas, mais le San Antonio a déserté ! Estevão Gomes, un ennemi de Magellan, refusait catégoriquement de s’aventurer plus loin en raison du manque de vivres. Il a donc fomenté une mutinerie et s’est emparé du San Antonio afin de retourner à Séville.

C’est donc avec trois navires seulement que la flotte de Magellan se présente au Pacifique. Tout le monde est épuisé. Les réserves de nourriture sont pratiquement à sec. Les navires sont en piteux état. Il serait sage de rentrer au pays et de revenir plus tard mais, pour Magellan, « toute action héroïque est nécessairement une action déraisonnable ».

Le 28 novembre 1520, pour la première fois de l’histoire de l’humanité, des hommes se lancent à l’assaut du plus grand océan du monde ! Comme le veut la coutume, on salue la mer en lançant une salve d’artillerie, « comme on salue un grand adversaire que l’on provoque à un duel à mort ».

Nos braves marins l’ignorent complètement, mais leurs souffrances ne font que commencer…

La suite de l’épopée de Magellan dans la prochaine partie ! Au programme : un océan cauchemardesque, des rencontres tumultueuses avec des indigènes, et une véritable tragédie…

 

Notes

Note : Un demi-siècle après Magellan, le corsaire anglais Francis Drake passera l’hiver dans la même baie de San Julian et y fera décapiter un de ses hommes ! Les restes de Quesada et Mendoza étaient encore visibles. Simple coïncidence… ou baie maudite ?

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