Ça swingue aux Etats-Unis ! Après des élections midterms moins flamboyantes que prévu pour le Parti républicain, Donald Trump est remonté sur le ring le 15 novembre dernier en annonçant sa candidature à l’élection présidentielle de 2024 avec un slogan percutant : MAGAGA (Make America Great Again, Great Again) ! Gabriel, qui avait déjà couvert les élections présidentielles de 2020 sur son blog, nous livre ici son analyse.
Comme tout bon aficionado du site UBD, tu ne pouvais pas rester insensible au comeback du candidat ayant distribué, en 7 ans, le plus de bonnes droites dans la face de l’establishment médiatique et mis KO la plupart de ses adversaires politiques. Pourtant, tu t’es mis à douter pour ton champion depuis sa défaite en 2020, aux points, contre le presque sénile mais non moins habile Joe Biden. Le combat pour la présidentielle 2024 sera-t-il le match de trop pour le fougueux milliardaire ? Pesons ensemble les pour et les contre d'un retour du boxeur politique le plus violent de la droite américaine.
5 raisons de se féliciter du retour de Donald Trump
1. Il est le candidat le plus expérimenté et charismatique parmi les candidats républicains potentiels
Donald Trump a été le quarante-cinquième Président des Etats-Unis de 2017 à 2021 et, à ce titre, il possède un avantage sur toute la concurrence. Il connaît le job et les Républicains gardent un excellent souvenir de son mandat. Jugé plus compétent et solide que Joe Biden sur différentes thématiques clés telles que l’économie, la politique internationale ou l’immigration d’après les sondages d’opinion, il est, de fait, la figure la plus charismatique et la plus connue de la politique américaine et aucun de ses rivaux potentiels au sein du Parti républicain ne lui arrive à la cheville.
2. Il a de l’argent et est donc indépendant de toute pression idéologique
Lors de sa première campagne présidentielle en 2016, Donald Trump était parvenu à vaincre l’establishment avec un discours populiste et antisystème bien rodé. Grâce à sa carrière dans le secteur de l’immobilier, Trump est milliardaire et donc totalement indépendant financièrement. Aux Etats-Unis plus qu’ailleurs, l’argent est le nerf de la guerre pour remporter une élection. En 2020, Trump avait dépensé pas moins de 1,3 milliard de dollars pour sa campagne. En plus de sa fortune personnelle, Trump est principalement financé par les petits donateurs et il dispose déjà d’un trésor de guerre de près d’un demi-milliard pour mener la campagne présidentielle de 2024.
A contrario, ses adversaires républicains, comme Ron DeSantis, sont financés par de gros donateurs qui pourraient avoir un droit de regard sur le programme proposé par le candidat. En 2024, Trump pourra donc encore se présenter comme le candidat antisystème face à ses concurrents.
3. Sa ligne idéologique est la plus proche des attentes des électeurs républicains
Donald Trump a sauvé le Parti républicain en 2016 en poussant celui-ci à abandonner la ligne idéologique néo-conservatrice et impérialiste défendue par Bush, McCain ou Romney dans les années 2000. Depuis le passage du bulldozer Trump, le Parti républicain est devenu un parti national-conservateur ou trumpiste avec une feuille de route claire : protectionnisme en économie, lutte farouche contre l’immigration illégale et la criminalité, bataille contre le politiquement correct des médias et le wokisme.
En adoptant un discours identitaire et nationaliste, Trump est parvenu à faire cohabiter les classes populaires et conservatrices au sein du parti de l’éléphant. Malgré un résultat des midterms en demi-teinte, cette ligne n’a pas été sanctionnée par les électeurs et même les pires ennemis de Trump au sein du parti admettent que le trumpisme a gagné. Qui mieux que Trump lui-même pour représenter cette ligne ?
4. Il est le candidat républicain qui a le plus de chances de remporter la présidentielle
L’élection présidentielle américaine est une élection au suffrage universel indirect. Pour l’emporter, il faut obtenir au moins deux cent soixante-dix voix parmi un collège électoral de cinq cent trente-huit grands électeurs répartis dans les cinquante Etats. Tous les quatre ans, à peine une dizaine des Etats sont réellement disputés entre les Républicains et les Démocrates : ce sont les fameux swing states !
Donald Trump est le candidat républicain disposant des meilleures chances pour 2024 car il semble, à ce jour, le seul capable de mobiliser les classes moyennes et populaires de la communauté blanche dans des Etats clés de la « Rust Belt » comme le Wisconsin, la Pennsylvanie ou le Michigan. Les Républicains devront remporter deux voire trois de ces Etats pour espérer l’emporter en 2024 et Trump est le plus à même de faire swinguer ces Etats.
5. C’est un showman et un incroyable candidat en campagne
5 raisons de regretter le retour de Donald Trump
1. Donald Trump est un candidat totalement diabolisé
Donald Trump représente le diable en personne pour près de 50% de la population américaine. La simple évocation de son nom peut rameuter une horde d’électeurs et d’électrices démocrates aux cheveux bleus aux urnes. En 2020, grâce aux aménagements des modalités de vote, en particulier le vote par correspondance, le parti démocrate a construit une véritable machine de guerre pour récolter les bulletins de ces électeurs anti-Trump qui n'auraient peut-être pas pris le temps de se déplacer aux urnes le jour J. Les Américains sont des gens simples qui s’intéressent peu aux élections et votent souvent en fonction d’un seul sujet ou thème et la peur de Trump reste une motivation de vote suffisante pour beaucoup d’électeurs démocrates mais aussi indépendants (ceux qui se situent au centre de l’échiquier politique).
2. Donald Trump a perdu son aura de winner
De 2016 à 2020, Trump avait construit ses campagnes présidentielles autour de son aura de winner. Il était ce magnat de l’immobilier milliardaire et intraitable présentateur télé du célèbre jeu The Apprentice à qui tout réussissait. Il promettait le retour de la grande Amérique, celle qui gagne tous ses deals et impose sa loi au monde entier. Avec la défaite de 2020, l’aura du winner s’est fissurée. Acculé, ce cher Donald a refusé de reconnaître sa défaite et a cherché par tous les moyens les preuves d’une fraude électorale sans précédent. Ces preuves ne s’étant jamais matérialisées, un doute s’est installé dans la tête de ses plus fervents supporters : est-ce que Trump est devenu un boulet électoral ? Le résultat en demi-teinte des Républicains aux midterms ne les a en tout cas pas rassurés. Les Américains détestent par-dessus tout les losers et si Trump ne parvient pas à se débarrasser de cette image, il est certain qu’il perdra.
3. Il a de nombreux procès aux fesses qui pourraient le salir
Donald Trump est personnellement visé dans quatre affaires à l’heure où l’on se parle. La première enquête concerne les activités commerciales de son entreprise avant son accession au pouvoir en 2016. La firme Trump est accusée d’avoir fraudé le fisc pendant quinze ans. Les trois autres enquêtes portent sur sa présidence :
- Il lui est reproché d’avoir, en 2020, fait pression sur le gouverneur de Géorgie pour faire annuler le résultat de l’élection présidentielle qui ne lui convenait pas dans cet Etat ;
- Il est jugé responsable des émeutes du Capitole du 6 janvier 2021 ;
- Il n’a pas rendu des documents classifiés lorsqu’il a quitté la Maison-Blanche et la CIA vérifie qu’il n’a pas fourni d’informations sensibles à qui que ce soit.
Si Trump a peu de chances d’être condamné dans les deux ans qui viennent dans l’une de ces affaires, les démocrates comptent bien se servir de celles-ci pour le traîner dans la boue. Un candidat Trump affaibli par les scandales et les procès est l’adversaire rêvé de Joe Biden.
4. Il est âgé et, peut-être, fatigué
Si Donald Trump ne fait pas son âge par rapport à Joe Biden, il n’en reste pas moins que l’ancien président sera âgé de soixante-dix-huit ans en novembre 2024. Dans ses derniers meetings, certains ont vu poindre une certaine lassitude voire même de la fatigue dans la gestuelle expressive du milliardaire. En outre, Trump risque de souffrir de la comparaison avec son jeune adversaire de quarante-quatre ans, Ron DeSantis, qui peaufine son image de bon père de famille droit dans ses bottes. A son âge, on souhaiterait à Donald de profiter de sa villa et de ses terrains de golf plutôt que de se lancer dans une troisième campagne présidentielle.
5. Son égo toxique pourrait faire exploser le Parti républicain s’il perd
C’est sûrement le principal argument contre la candidature de Donald Trump à ce stade. Que se passera-t-il si Trump est vaincu lors des primaires républicaines ? Acceptera-t-il sa défaite ? Se présentera-t-il en candidat indépendant ? Demandera-t-il à ses supporters de s’abstenir de voter à la présidentielle ? Tout est possible avec lui et l’ego surdimensionné de Donald Trump pourrait encore une fois être fatal à toute la droite américaine. Si Donald Trump veut rester dans l’histoire et inscrire durablement son courant de pensée dans le Parti républicain, il serait mieux avisé de nommer son successeur et de se retirer si jamais les élections tournent mal pour lui. Trump étant un redoutable guerrier, le risque est grand qu’il entraîne le Parti républicain dans sa chute et celle-ci ne pourra avoir lieu que dans le sang.
En définitive, je dirais que le retour de Donald Trump est, pour l’instant, plutôt une mauvaise nouvelle pour le Parti républicain. Si les Républicains ne peuvent pas se passer de lui pour gagner, il a toutes les chances de perdre face à un candidat démocrate extrêmement modéré comme Biden. Donald Trump aurait dû nommer clairement un héritier, plus jeune et plus lisse, pour cette présidentielle. Les Américains veulent, en effet, revenir à plus de modération et la personnalité de Trump risque d’inquiéter les électeurs indépendants.
Néanmoins, comme Trump ne compte pas abandonner la course, il faut lui souhaiter de l’emporter largement car son égo toxique pourrait le pousser à annihiler toutes les chances de victoire du Parti républicain en représailles. Alors, en attendant que les autres Républicains sortent du bois, profitons des futurs punchs médiatiques de notre champion Donald !
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Gabriel R.